mardi 6 octobre 2015

Petit billet Mousseline.





Double, déjà, avant de naître. Faussement jumelle. Séparée, déjà, du désir de l’autre originaire. La mère morte. Enfance enfuie, déjà, hors de la structure nucléaire. Sans nom du père.

C’est ainsi que se présente à la vie Marielle avant que Mousseline et ses doubles ne se présentent au monde, à nous, par l’entremise de l’admirable écriture de Lionel-Edouard Martin où s’engagent les mots et le pari de la littérature. Surseoir au désastre de l’ex-sister. Car C’est au fond ça, la littérature: la mise en mots, bien orchestrée, sonnant juste, de ce qui bouge en nous, mais qui refuse d’en sortir – ce que mon Joseph appelait « l’enfance ».

L’enfance disparue de Marielle trouvera à renaître au prix d’une substitution, au prix d’une nomination nouvelle. Celle de Mousseline. Petit nom qui évoque une chose plutôt qu’un être, une chose fragile et si légère, toile si transparente qu’elle ne se porte que soutenue d’une doublure. Corps et âme cachés, donc, par ces doubles-doublure comme autant de prothèses dont, au fil d’Ariane de son texte, Lionel-Edouard Martin se charge de dire l’importance pour mieux s’en défaire. Quitte à ce qu’une destinée nouvelle et heureuse ne soit faite que de pêche aux moules, aux coques, aux palourdes.

Bien plus que le théâtre d’une saga familiale (il faudra peut-être que les Editions du Sonneur se penche sur les contenus d’une quatrième de couverture), il y a là une lente et minutieuse reconstitution de cet « il y a » qui, à l’instar des précautions prises dans une psychanalyse, cherche dans la relative exactitude des mots à rendre visible le sol où se déploient les fictions du sujet et le sujet comme fiction. Où à ton approche s’envolent mouettes, sternes et cormorans.

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