Double, déjà, avant de naître. Faussement jumelle. Séparée, déjà, du désir de l’autre originaire. La mère morte. Enfance enfuie, déjà, hors de la structure nucléaire. Sans nom du père.
C’est ainsi que se présente à la vie Marielle avant
que Mousseline et ses doubles ne se présentent au monde, à nous, par
l’entremise de l’admirable écriture de Lionel-Edouard Martin où s’engagent les
mots et le pari de la littérature. Surseoir au désastre de l’ex-sister. Car
C’est au fond ça, la littérature: la mise en mots, bien orchestrée, sonnant
juste, de ce qui bouge en nous, mais qui refuse d’en sortir – ce que mon Joseph
appelait « l’enfance ».
L’enfance disparue de Marielle trouvera à
renaître au prix d’une substitution, au prix d’une nomination nouvelle. Celle
de Mousseline. Petit nom qui évoque une chose plutôt qu’un être, une chose
fragile et si légère, toile si transparente qu’elle ne se porte que soutenue
d’une doublure. Corps et âme cachés, donc, par ces doubles-doublure comme
autant de prothèses dont, au fil d’Ariane de son texte, Lionel-Edouard Martin
se charge de dire l’importance pour mieux s’en défaire. Quitte à ce qu’une
destinée nouvelle et heureuse ne soit faite que de pêche aux moules, aux
coques, aux palourdes.
Bien plus que le théâtre d’une saga familiale (il
faudra peut-être que les Editions du Sonneur se penche sur les contenus d’une
quatrième de couverture), il y a là une lente et minutieuse reconstitution de
cet « il y a » qui, à l’instar des précautions prises dans une psychanalyse,
cherche dans la relative exactitude des mots à rendre visible le sol où se
déploient les fictions du sujet et le sujet comme fiction. Où à ton
approche s’envolent mouettes, sternes et cormorans.
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